Par MONTS
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et par VAUX |
par Serge Dulout
Mountain Wilderness France, Bulletin N°56, 2003
Le 20 décembre 2002, les élus haut-pyrénéens
ont signé une grande première dans le monde de la montagne :
interdire les descentes à skis non encadrées par des professionnels
(guide ou moniteur de ski).
NDLR : hélas ce n'est pas une première, voir par exemple
sur ce site les interdictions dans la station des Arcs. Cela se pratique aussi
couramment à La Plagne sur le télésiège au sommet
de Bellecôte qui donne notamment accès à la face nord
et à la petite face nord.
Le "collectif Pic du Midi", auquel Mountain Wilderness participe, créé pendant l'été 2000, au lendemain de l'interdiction d'accès, a déjà dû longuement batailler pour faire comprendre aux responsables que le Pic, bien qu'occupé par un observatoire, était aussi un sommet de haute-montagne particulièrement prisé des montagnards (jusqu'à 1600 m de dénivelée pour accéder à 2877 m d'altitude par la voie classique). La solution trouvée pour l'été semble satisfaire une majorité de pratiquants même si la traversée Est-Ouest est toujours, en théorie, impossible.
En ce qui concerne la saison hivernale, nous avons la même philosophie. Bien que n'ayant jamais été associés aux discussions sur la descente à skis, nous continuons à défendre la liberté d'accès pour tous et refusons la pérennisation d'un système mis en place à titre expérimental en 2001 afin de mieux étudier les conditions de ce parcours. La seule solution possible pour de telles descentes, dans un esprit de responsabilité et de connaissance de la montagne, ne peut être que le système instauré à La Grave : une information claire des dangers objectifs et, éventuellement, une commission quotidienne de sécurité. Car le système mis en place dans les Hautes-Pyrénées aboutit à exclure de l'accès à la benne des montagnards responsables et expérimentés, au profit de "touristes" de la station de ski de la Mongie, toute proche.
On retrouve dans cette décision une conception qui semble, malheureusement,
largement répandue dans le monde politique, même chez ceux qui
se targuent d'être de vrais montagnards, à savoir que les pratiquants
de sports de montagne sont, par définition, des "irresponsables",
des "inconscients" voire des "cascadeurs" (cf. l'opinion
des sénateurs, lue dans le rapport sur la loi montagne, si, si !) qu'il
convient de protéger contre eux-mêmes si possible par des contraintes
financières. Au moins, ce ne sera pas perdu pour tout le monde !
C'est le même état d'esprit qui prévaut pour mettre fin à la gratuité des secours et cela devient franchement inquiétant ! Car, derrière le discours "sécuritaire", se cache en fait un vaste mouvement d'irresponsabilité généralisée. Les élus locaux veulent récupérer un peu d'argent et surtout redorer l'image du Pic mais ne veulent pas assumer les conséquences éthiques et politiques de leur choix, les professionnels acceptent cette semi-privatisation de l'espace public montagnard à leur profit et enfin, les "gérants" du Pic qui "ne veulent pas communiquer sur la descente à skis pour éviter les ennuis" sont tout de même très satisfaits que d'autres le fassent à leur place (revues spécialisées, télévisions, radios et tous les journaux). Et tout ce joli monde s'entend sur le dos du pratiquant qui tente d'être responsable et autonome, de se former dans les clubs, de respecter le milieu. Mais cet "enquiquineur" qui ne rapporte pas gros, peut coûter cher ! Alors pourquoi prendre en compte ses demandes ?
Et pourquoi la montagne devrait-elle échapper à la marchandisation du monde ?